À nos amis du GATA et de l’or :
Dans son dernier commentaire, l’économiste et analyste des marchés, Martin Armstrong, clame qu’il n’y a pas à s’inquiéter des manipulations sur les marchés et que les plaintes de manipulation du marché de l’or sont sans fondement.
Le commentaire d’Armstrong est intitulé « Market Manipulations : The Greatest Scam of All Time » (Les manipulations de marché : la plus grande escroquerie de tous les temps). Ce titre démontre sa prétention à l’omniscience, soit qu’il connaît très bien toutes les fraudes de l’Histoire.
Il poursuit : « À travers l’Histoire, il n’y a jamais eu un marché manipulé dont la tendance à long terme en aurait été altérée – point final. »
Ainsi Armstrong prétend connaître tous les marchés qui ont existé depuis l’Homme des cavernes, quand Og, de l’âge de pierre, est devenu le premier trader de matières premières, en essayant de vendre à sa tribu dix plumes de ptérodactyle qu’il ne possédait pas, dans l’espoir que cela intimiderait Zug afin qu’il réduise le prix de la plume qu’il essayait d’échanger contre une douzaine de crochets à poisson en dents de mastodonte, alors qu’il n’en possédait que cinq.
Les connaissances d’Armstrong sont vraiment impressionnantes, car aucun registre des transactions d’Og n’a été conservé. Mais Armstrong prétend connaître l’histoire de tous les marchés, depuis des milliers d’années, avant que des traces n’aient pu être conservées.
Par la suite, le commentaire d’Armstrong tourne à l’autocongratulation, en soulignant comment, il y a deux décennies, il avait eu raison à propos du marché de l’argent, alors que d’autres « gros bonnets » s’étaient trompés. Apparemment, cette affirmation, également, est censée s’appliquer à toute l’Histoire.
Et la grande conclusion d’Armstrong : « Il n’y a pas de complot secret pour garder bas le prix de l’or et pour prétendre que l’inflation est plus faible. »
Armstrong prétend donc connaître l’esprit de chaque participant au marché mondial, des banquiers centraux aux « vieilles tantes » chinoises qui veulent mettre un peu d’or de côté pour leurs petits-enfants.
Jadis, une affirmation comme celle de Armstrong était appelée ipse dixit, « il l’a dit lui-même » en latin, comme si l’orateur présumait que son autorité suffisait, sans besoin d’aucune preuve. Armstrong est peut-être un prodige, mais il n’a pas inventé la tête gonflée… il ne fait qu’en porter une.
Pas besoin d’être omniscient comme Armstrong pour remarquer la faille dans son affirmation : « À travers l’Histoire, il n’y a jamais eu un marché manipulé dont la tendance à long terme en aurait été altérée – point final. »
Premièrement, pour commencer, Armstrong ne définit pas ses termes. Qu’est une « tendance à long terme » et une « tendance à court terme »? Et même si Armstrong les définissait, cela tiendrait-il pour les autres ?
Armstrong admet la possibilité de manipulations du marché à court terme allant à l’encontre des tendances à long terme. Il cite le communisme soviétique, une vaste manipulation de marché qui a détruit l’intégralité des marchés. Peut-être ne niera-t-il pas que le gouvernement américain a gardé le prix de l’or à 20,67 $, puis à 35 $, durant plusieurs années, ce qui a empêché le développement de tout marché de l’or.
Bien sûr, les pressions du marché ont aidé à briser le communisme soviétique ainsi que l’arrimage du dollar US à l’or et d’autres manipulations de marché, et les prix en découlant pourraient faire office de justification de la « tendance à long terme ». Mais une justification pour quoi et pour qui ?
Car, comme Keynes le notait, en parlant de gens comme Armstrong : « Le long terme est un horizon peu intéressant. A long terme, nous serons tous morts. Les économistes n’apportent rien si, en pleine tempête, tout ce qu’ils trouvent à dire est qu’une fois l’orage passé la mer sera calme. »
Après tout, même si Armstrong voit l’histoire de l’Union soviétique comme du court terme, elle a néanmoins duré plus de 70 ans et détruit ou ruiné des millions de vies. Même une manipulation de marché qui dure sur une période beaucoup plus courte – quelques semaines ou mois, ou seulement quelques jours – peut sensiblement priver des gens et leur faire beaucoup de mal.
Traversant l’espace et le temps, Armstrong est trop brillant pour comprendre que, pour les simples mortels, le temps, c’est de l’argent. Cela me fait penser à Mark Twain, qui disait : « Moins quelqu’un en sait, plus il fait du bruit et plus on doit le payer cher. »
L’analyse d’Armstrong du marché de l’or – en fait, étant donné la connexion du marché de l’or aux autres marchés importants, son analyse de tous les marchés – serait plus utile si elle posait les questions suivantes:
Les banques centrales agissent-elles subrepticement, ou non, sur le marché de l’or ?
- Si les banques centrales agissent subrepticement sur le marché de l’or, le font-elles seulement pour le plaisir – par exemple, pour voir quelle banque centrale a les meilleurs traders, ceux qui peuvent faire le plus d’argent en escroquant le plus d’investisseurs – ou bien par but politique ?
- Si les banques centrales et les gouvernements agissent sur les marchés de l’or, de l’argent et des matières premières dans un intérêt politique… est-ce pour causer du tort à une devise de réserve mondiale potentiellement compétitive… ou est-ce pour d’autres raisons ?
- Si les banques centrales, créatrices de monnaie à l’infini, agissent subrepticement sur un marché, comment peut-on encore appeler ce marché un marché ? Et comment un pays, ou le monde, peut-il retrouver une économie de marché ?
- Bien entendu, il y a tout juste une semaine, un autre banquier central a laissé entendre que certaines banques centrales intervenaient subrepticement sur le marché de l’or, tout en tentant d’augmenter leurs réserves d’or, intervenant apparemment pour aider à garder le prix bas pour leur en faciliter l’acquisition.
Avec son omniscience, Martin Armstrong peut bien traiter ces allégations comme si elles venaient d’un autre univers, mais ceux qui y vivent peuvent y trouver leur compte.
CHRIS POWELL, GATA
Source: http://gata.org/node/15905
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