Lelde Smits : Lelde Smits pour Finance News. Je reçois aujourd’hui Jim Rickards, Senior Managing Director pour la banque d’investissement Tangent Capital, basée à New York. Jim, bienvenue à la conférence Mines and Money de Londres.
Jim Rickards : Merci, Lelde.
L.S. : Jim, un des faits marquants depuis que notre dernière entrevue, à Sydney, en octobre 2012, est le prix de l’or, qui a depuis perdu environ 30%. Qu’est-ce qui a précipité cette baisse, selon vous?
J.R. : Il y a probablement plusieurs raisons… pas seulement une. Je pense qu’il y a eu de la manipulation de prix par les banques centrales. Nous savons tous que cela arrive, ce n’est plus des suppositions; cela est même avoué de certaines manières.
Vous savez, à chaque fois que vous essayez de résoudre un crime, vous cherchez le motif, vous vous demandez à qui le crime profite. Ceux à qui un prix bas de l’or profite le plus sont les Chinois, en fait, parce que ce sont eux qui doivent en acheter le plus. Les gens pointent la Fed du doigt, mais il faut aussi soupçonner la Chine, ainsi que des hedge funds qui seraient impliqués.
Traditionnellement, les hedge funds n’ont jamais été très impliqués sur le marché de l’or, mais ils le sont maintenant. Peu importe aux hedge funds d’échanger de l’or ou des cartes de baseball; Ils veulent juste faire de l’argent. Aussi, ils aiment bien manipuler. Et les lois sont très peu appliquées aux États-Unis en ce moment, cela constitue donc presque une invitation aux hedge funds pour venir jouer et s’amuser.
Il se passe d’autres choses, dont certaines sont très techniques.
L.S. : Avez-vous vu venir cette baisse du cours de l’or?
J.R. : Quand le prix de l’or a atteint $1,900 l’once, j’ai senti que cela ressemblait un peu à un pic. Maintenant, je ne crois pas qu’il s’agisse d’une bulle; vous devez regarder les fondamentaux. Le prix fondamental de l’or sera bien, bien plus élevé. Mais, quand – et encore, cela n’a pas d’importance que ce soit l’or ou toute autre matière première, ou même les actions – le prix monte autant et si vite, il faut s’attendre à une correction.
Je ne m’attendais pas nécessairement à une correction de cette ampleur, mais il est intéressant que nous ayons testé le niveau de $1,250 à trois reprises. Et il semble y avoir un plancher à ce niveau; je l’appelle le « plancher chinois »…
L.S. : Où se dirige le prix de l’or, à l’orée de 2014?
J.R. : Cela dépend vraiment du combat entre la déflation et l’inflation. Au final, j’entrevois l’or à un prix bien plus élevé; je le vois à $7,000 ou $9,000 et même plus haut, en me basant sur les fondamentaux et sur la perte de confiance dans notre système monétaire international actuel.
Mais si le prix baissait, cela constituerait un puissant signal que la déflation gagne le combat. Il y a une lutte entre la déflation et l’inflation. Je crois qu’à la fin l’inflation gagnera, parce que les banques centrales y veilleront. Mais à court terme la déflation pourrait gagner, et faire descendre l’or un peu.
L.S. : J’ai entendu dire que vous aviez récemment visité quelques coffres et raffineries… Avec le prix de l’or aussi bas, comparé au niveau où il était, avez-vous été tenté d’en acheter?
J.R. : Et bien, oui. Je viens de lancer un fonds commun de placement avec des partenaires dans lequel nous avons une forte allocation de métaux précieux. De l’or, bien sûr, mais aussi de l’argent, du platine et du palladium. Oui, je pense que pour un fonds, c’est un très bon point d’entrée.
L.S. : Si on jetait un coup d’oeil au Bitcoin, maintenant? Il a pris du poids depuis que nous nous sommes parlé, atteignant récemment des sommets historiques. Quel rôle croyez-vous que cette devise virtuelle peut jouer dans l’économie mondiale?
J.R. : Le phénomène Bitcoin est intéressant. En fait, j’ai lu plusieurs articles techniques ainsi que certains documents juridiques à son sujet. Je ne suis pas anti-bitcoin, ou un critiqueur du bitcoin. Je n’investis pas personnellement dans le Bitcoin et je ne le recommande pas à mes clients. Je le comprends, de manière technique. Ils semblent plaire aux technophiles et aux libertaires.
La seule chose que je dis à ces partisans du Bitcoin, c’est faites attention à plusieurs choses. Premièrement, si vous achetez un Bitcoin à un certain prix et que vous l’échangez pour des biens ou services alors qu’il est à un niveau plus élevé, vous avez un gain imposable que vous devez déclarer dans vos revenus. J’oserais avancer que très peu de gens font cela et qu’ils deviennent en quelque sorte des fraudeurs fiscaux.
Et plusieurs gens pensent que, si vous êtes dans le nuage Bitcoin, le gouvernement ne surveille pas… Il surveille. Alors, considérez le fait que vous puissiez être un fraudeur fiscal et que le gouvernement vous surveille… cela jouera, avec le temps. Alors il faut faire un peu attention avec le Bitcoin.
L.S. : Vous venez de donner une présentation ici, à Mines and Money, sur les perspectives pour les métaux précieux et l’économie mondiale. Est-ce que les prix des métaux précieux sont à leur plancher, et s’en va-t-on vers une reprise?
J.R. : Tout dépend de l’économie. Les prix des métaux précieux ne bougent pas dans le vide, ils vous envoient des signaux de prix en réponse à l’économie. Donc, si l’inflation grimpe, ils monteront bien plus haut. Si le système monétaire international s’effondre, ils seront multipliés par cinq ou dix. Mais si nous sommes pris avec de la déflation, ils pourraient descendre en termes nominaux tout en performant mieux que les autres catégories d’actifs en termes réels.
L.S. : Et que prévoyez-vous?
J.R. : Je crois que la Fed et les autres banques centrales vont gagner la bataille. La déflation serait l’état naturel des choses, mais les banques centrales la craignent tellement qu’elles vont obtenir de l’inflation par la force. Le problème est que, lorsqu’elles auront un peu d’inflation, elles se rendront compte que cette inflation ne s’arrêtera pas de monter, et cela fera grimper les métaux précieux bien plus haut. Mais, vous savez, cela pourrait prendre quelques années… je ne dis pas que cela se produira dans les prochains mois.
L.S. : Mais, à court terme, l’optimisme est en hausse sur les marchés actions et plusieurs prédisent une bonne année 2014. Êtes-vous d’accord?
J.R. : Le prix des actions va continuer de grimper tant que la Fed et les autres banques centrales impriment de l’argent. C’est une bulle. Cela va mal se terminer. Les gens vont voir la Bourse perdre de 30 à 40% en quelques semaines ou moins. Mais, pour le moment, je m’attends à ce que le prix des actions monte encore, mais pas pour les bonnes raisons.
L.S. : Alors finalement, Jim, quel serait votre meilleur conseil pour les investisseurs en 2014?
J.R. : Comme je dis, je recommande aux investisseurs d’allouer de 10 à 20% de leur capital dans l’or ou les autres métaux précieux. 10% pour l’investisseur conservateur, 20% pour l’investisseur plus agressif. Cela vous sera profitable en temps d’inflation, de déflation, de guerre ou de paix. En réalité, c’est une police d’assurance; tout le monde devrait en avoir une. Il ne faut pas tout mettre, mais 10 à 20%.
L.S. : Jim Rickards, merci de nous avoir parlé ici à Londres, et merci comme toujours pour vos conseils.
J.R. : Merci, Lelde.
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